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30 octobre 2015

Nina Hagen @ L'Usine (Istres)

Une Nina sans les crocs ...

Conditions de mise en boîte

Trois premiers morceaux dans les crash barrières.

Chronique

Etiqueté par Arnaud :

Dans mon inconscient culturel, Nina Hagen c’est l’égérie Punk des années 70/80, dans un style Rock taillé dans la masse, là où Siouxsie Sioux était dans un Post-Punk teinté de Cold-Wave quelques années plus tard. Ces deux femmes sont vraiment pour moi l’image précurseur de la gonzesse qui casse les codes, sans se soucier du qu’en dira-t-on ; Courtney Love et même les Spice Girls leur doivent tout !

Alors, quand j’apprends le passage de Nina en Mars 2015, je suis hyper déçu : pas libre, je ne pourrais pas la voir. Mais le sort veut qu’une infection dentaire repousse son passage à cette date de fin Octobre ! Et moi j’applaudis des deux mains les dents récalcitrantes, me délectant par avance de ce petit concert dans cette chouette salle.

Cette icône prouve d’ailleurs son rang dès son entrée sur scène : elle arrive toute seule, avant l’heure ! Et toc : Madame fait ce qu’elle veut et si elle veut commencer avant et toute seule, et bien personne ne l’en empêchera ! Si ça ce n’est pas Punk ! 😉 Et le groupe a intérêt à vite monter sur scène, sinon ils loupent le train ! Ils se feront d’ailleurs rapidement reprendre en allemand ! On sait clairement qui est la chef ce soir !

Bon, de vous à moi, ce pan anarchique-bordélique ne sera que dans le déroulement du concert, où l’on sent que rien n’est préparé et tout plutôt joué au feeling, mais pas du tout dans le choix du thème musical. Et si ce principe bordélique peut être plutôt agréable quand cela vient du Rockeur Louis Bertignac (qui maintient tout de même une certaine trame), c’est plutôt déconcertant de sentir ce laisser aller chez Nina : le public n’en tire que peu de plaisir et le concert manque cruellement de cohésion. Heureusement, personne n’a hurlé La danse des canards ou Le Petit bonhomme en Mousse car sinon, je crois qu’on les aurait eu en rappel… C’est pour dire !

Et là où le public ne tire définitivement plus de plaisir, c’est de ne plus du tout sentir ce côté hors norme dans le choix et la réalisation des titres. S’il fallait s’attendre à beaucoup de reprises (et ce n’est pas grave), c’est un peu plus triste de perdre la force et l’énergie du Punk contre une certaine mollesse du Folk, du Reggae, voire presque de chants sacrés ou de psaumes. Putain ! Mais on est pas venu écouter ça ! On veut suer et limite pogoter ! Il n’en sera rien et on aura une suite de chansons sur la paix dans la monde. Cela peut être chouette quand c’est fait en mode Rock musclé ou Folk mélodique (comme peut le faire un Orphaned Land), mais moins bien quand Nina nous propose une Alabama Song, des regrettés The Doors, molle à mourir et sans grand entrain !

Ça hurlera d’ailleurs un peu dans la salle pour tenter de réveiller la belle… Sans grande réaction. Je crois qu’une partie de la salle décidera même de lâcher l’affaire, pour plutôt se rincer le gosier ou rentrer à la maison.

Et, pour couronner le tout, le concert ne durera péniblement que 1h30… Si peu quand on sait les capacités de la dame… Ce n’était pas la bonne soirée… Peut-être une dent contre Istres 🙂

Tout comme Bob Dylan, je suis heureux d’avoir vu cette icône et tout comme le roi du Folk, je crois que j’ai vu Nina Hagen trop tard : veillir c’est vraiment pas génial pour tout.

Etiqueté par Ysabel :

Lorsque je scrute la scène à mon arrivée dans L’Usine, avec ce lourd rideau bleu nuit en fond, très loin (j’ai même rarement vu autant de profondeur ici), et des instruments évoquant plutôt un Live acoustique … C’est amusant, parce que ce n’est vraiment pas la trash Nina Hagen que tout cela m’évoque.

Pourtant c’est bien elle qui débarque et en pleine lumière en plus, nous annonçant qu’elle en a marre d’attendre 21h (il est moins 10), parce qu’on lui manque trop ! Ceci étant, même si c’est en avance et sans trop de mise en scène … On n’est pas déçu !! C’est une apparition digne de la plus farfelue des reines de cabaret, avec plumes sur la tête, voilage à motif léopard bleu par dessus sa tenue, bottes noires ornées de fleurs rouges (assorties à celle ornant ses cheveux) et ras du cou en cuir clouté … La totale quoi. Les musiciens, eux, ne sont pas encore là : « Ils ne savent même pas que je suis là » nous explique-t-elle, dans son légendaire anglo-franco-allemand.

Puis ses compagnons viennent tout de même la rejoindre. Et elle sort un exemplaire de Thou, Dear God (Prières de Martin Luther King), dont elle fait traduire un passage par Warner Poland, son guitariste. Tout ce doux bordel donne un sentiment d’apparente improvisation, qui s’enchaine avec un espèce de bœuf musical, mi-jazz, mi-country … Et je dois reconnaitre que je m’attendais à tout sauf à ça ! Mais en y réfléchissant bien, c’est tout à fait elle un projet pareil. Elle et son regard barré, avec ses grands yeux ronds exorbités, qui entame un improbable twist, pendant qu’un roadies vient arranger sa guitare.

Elle tient à nous présenter le morceau suivant en nous parlant de Rosetta Tharpe, « The grand-mother of Rock n’Roll », découvrant un sexy leggings cuir et une sorte de tutu-boule quand elle se lève pour danser. Chantant de son inimitable anglais aux R roulés, avec cette voix capable de sacrément descendre dans les graves … Une artiste incroyable, mais sur laquelle il est parfois compliqué de se concentrer, aux vues de cette grosse fleur qui se dandine au-dessus de son front, comme sur le chapeau d’un clown.

Elle continue avec son bouquin, qu’elle consulte entre les chansons … Définitivement un sacré numéro sur scène 😉 Alors comment ne pas se dire que nous sommes en face d’un phénomène surprenant, drôle et improbable à la fois. Faisant des ballades qu’elle nous interprète, sans doute de doux Blues pure souche au départ, des trucs bizarres, hyper sur-joués.

On continue avec un peu d’allemand. Elle, sur son tabouret en mode Cabaret (mais je pense que, pour moi, la langue y est pour beaucoup). Il faut dire aussi que nous avons autant affaire à une actrice qu’à une chanteuse. A un moment, elle reste seule avec son pianiste, demandant qu’on lui traduise une phrase en français … Une histoire de pouvoir de la lumière … Elle est barjo et dans son personnage jusqu’au bout des ongles. Réussissant encore à nous surprendre avec une voix quasi de rockeuse sur Sometimes I Feel Like A Motherless Child. Traitant, au passage, la poursuite de « fucking pouvoir de lumière » et tenant son micro avec son gros doigt en poupée (une sombre histoire de coupure et de nuit passée à l’hôpital, après son concert de Toulouse de la veille, d’antibiotiques, de voix un peu Out et surtout de beau docteur qui lui a sauvé la vie … Rien de moins !)

Une reprise de Ella Fitzgerald, nous dit-elle de sa grosse voix, avec petit pont dans la langue de Goethe (probablement pas dans la VO), qui amène à point nommé la transition vers un truc inspiré de Brecht (oui, je reconnais que je n’ai pas tout compris, mais elle n’est pas facile à suivre la bougresse !) Elle reprend donc sa guitare, souffle (elle va sembler peiner à plusieurs reprises au long de son Set) et repart dans ses R gutturaux. J’en profite pour tenter de décrypter le sentiment qui se lit sur les visages qui m’entourent et, pour résumer, je dirais : médusés. Voire même peut-être un peu teintés de perplexité … En tous cas, c’est le cas pour moi. Un répertoire un peu space, il faut avouer, et pas forcément en phase avec la légende qu’on peut avoir envie de découvrir Live.

Elle fait également d’étranges mélanges, comme cette chanson qui commence comme une de celles qu’on pourrait chanter en colo et qui tourne au By The Rivers Of Babylon (oui, oui, celui de Boney M !!), mais en version free style. S’en suit un medley juste improbable, décousu à souhait, mêlant anglais et allemand de la plus surprenante des manières, avec une histoire de Helmut Kohl au milieu. Le tout accompagné de faux airs d’ingénue et de fantaisistes bruitages.

« Merci mon chéri » pour une chanson de Lenny Kravitz, avec de la paix en Irak et du Georges Bush (vous avez vu : je m’accroche, je m’accroche !) qu’elle réussit à exprimer en français, tout en nous gratifiant d’un remerciement digne d’une diva et d’une attitude de rockeuse … Un concert définitivement décousu, mais au long duquel je me laisse somme toute et bizarrement porter, d’une certaine manière. Elle est totalement déroutante et je pense que c’est ce qui me plait. Même si je ne suis fondamentalement pas accrochée musicalement parlant. Et puis, il faut reconnaitre qu’elle est toujours aussi fascinante. Qu’on ne voit qu’elle (enfin perso, je la mange des yeux). Et que tout le spectacle ne tourne qu’autour d’elle, l’interaction avec ses musiciens étant quasi nulle, mis à part ses quelques demandes de traduction. Mais pour ce qui est du burlesque : elle est imbattable ! On est même dans le limite caricature de Rabbi Jacob pour son espèce de medley de musique feuj’, qui se termine par un « Clap your hands for peace » assez incongru.

Elle ressort son fameux bouquin et passe à Elvis ! Le spectre est large et elle m’apparait définitivement barrée … Partant dans le gospel pour terminer par un « The Punk is not dead ! » Ok. Pourquoi pas hein, si elle le dit 😛 Mais c’est alors African Reggae qui est demandé et je suis assez d’accord : revenons aux fondamentaux, ça ne nous fera pas de mal. Elle va d’ailleurs nous le faire, même si elle dit préférer le Russian Reggae. Les musiciens se marrent d’ailleurs, l’air un peu perdus quand elle commence une espèce de Kalinka déjanté. Mais le public insiste. Donc African Reggae il y aura. Elle demande tout de même à ses compagnons s’ils la connaissent (donc prévu ou pas prévu : va savoir !) … Et je dois avouer que là, là : on s’éclate ! C’est tellement plus elle que son Folk zarbi !! Même son guitariste se lâche en marchant et sautant sur place comme un calu. Elle demande à enchainer sur Alabama Song (ah ben voilà !) et c’est comme si on changeait carrément de concert. Là elle est incroyable. Appuyée sur son pupitre et encourageant la salle à chanter. Oui, là, tout le monde semble bien plus dans son élément.

Mais retour au monde des cowboys … Ben ouais, fallait pas rêver 😉 ! Son collier la gène : elle le balance par terre et nous fait un cinoche pas possible … Tout y passe, de Michael McCarty à la volonté de ne plus utiliser de nucléaire sur la planète (Très COP21 comme concert), en passant par le fan qui crie « I love you Nina ! » et à qui elle répond « Merci chéri. I love you too ». Il est clair que, pour ses 60 ans, elle est incroyable de vie, de jeunesse dans sa tête et d’espièglerie dans ses interprétations. Ayant l’air, à chaque fois, de se demander qu’elle sera la prochaine mais gardant toujours sa ligne à elle, malgré les demandes de la salle … Ce qui me laisse à penser que je ne suis pas la seule que ce répertoire Folk ne fait pas totalement kiffer. Même si le plaisir de la voir sur scène emporte au final le morceau. Il nous reste quelques chansons, dont une histoire de Kirk et de guerre … Ça reste rigolo, mais un peu space et légèrement chiant sur la fin, malgré de jolis remerciements en musique, avec des Vive Tout et un salut de danseuse étoile, plus du Peace et des Bisous !

Elle revient en couvrant les demandes du public par des grognements dans son micro, accompagnés d’une chorée très personnelle. Mais son besoin de souffler régulièrement semble montrer qu’elle peine un peu, même si elle fait mine de le scénariser pour le faire passer inaperçu. Elle rame d’ailleurs au début de cette reprise des Doors, qui au final rend pas mal. Enfin, perso, j’aime bien. Puis elle revient au « Pouvoir de l’amour » de son bouquin … Ah non, c’est un autre (elle est venue avec sa bibliothèque ou quoi ?!), pour terminer son concert par un Sometimes I Ring Up Heaven plutôt réussi.

Bilan global … Loufoque : Oui. Rigolote : Oui. Barrée : Totalement. Mais bien éclairée d’avoir décidé de partir dans ce registre Folk revisité : pas sûre, mais pas grave … On vous aime quand même beaucoup Madame Hagen 😉

Composition

  1. God’s Radar
  2. Didn’t It Rain (Rosetta Tharpe)
  3. Just A Little Talk With Jesus
  4. Right On Time
  5. Das Veilchen
  6. Sag Mir Wo Die Blumen Sind
  7. Sometimes I Feel Like A Motherless Child
  8. I Want To Be Happy (Ella Fitzgerald)
  9. Hosannah Rockefeller
  10. I’ve Got Peace Like A River/By The Rivers Of Babylon (Boney M)
  11. We Want Peace (Lenny Kravitz)
  12. All You Fascist Bound To Loose
  13. Hevenu Shalom Aleichem
  14. Jerusalem
  15. Milky White Way (Elvis Presley)
  16. African Reggae
  17. Alabama Song (The Doors)
  18. Help Me
  19. Boom
  20. We Shall Overcome
  21. My Sweet Lord
  22. I’ll Live Again
  23. Soldatenmelodie (Wolf Biermann)
  24. This Train
  25. 1er Rappel : Riders On The Storm (The Doors)
  26. Sometimes I Ring Up Heaven

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